COVID-19: Les employés de la SAQ sont exposés à un stress de plus en plus difficile
Alors que le gouvernement Legault a ordonné la fermeture de tous les services non essentiels afin de freiner la propagation de la COVID-19, une bonne partie de la population s'interroge à propos de la nécessité de laisser ouvertes les succursales de la Société des alcools du Québec (SAQ). Le syndicat des employés de la SAQ est aussi du même avis et il réclame la fermeture immédiate des succursales aux clients.
Selon Katia Lelièvre, présidente du Syndicat des employés de magasin et de bureau de la SAQ, de nombreux employés lui ont confié avoir dû composer avec des clients très négligents, ce qui contribue à augmenter le stress de tous les travailleurs de façon considérable. La présidente a déclaré au journal Le Soleil: "Les employés paniquent. On a plein de clients qui nous disent candidement qu’ils viennent de rentrer au pays et qui, là, s’en vont en quarantaine, et c’est pour ça qu’ils achètent des caisses de vin. [...] Il y en a d’autres qui nous disent : “Mon employeur m’a dit de m’en aller chez nous, alors je viens acheter du vin, parce qu’avec mon isolement, je ne pourrai pas sortir”."
Linda Bouchard, porte-parole de la SAQ, explique pour sa part: "Nous, on suit les recommandations de la Santé publique. On est en lien constant avec les instances du gouvernement. Donc, on met les mesures en place pour s’assurer de la protection de tout le monde, mais on reste ouvert."
La porte-parole dit espérer que la population se plie volontairement aux consignes annoncées par le gouvernement, mais elle reconnaît que ce n'est malheureusement pas le cas pour une grande partie de la clientèle.
Pour le moment, ce sont donc les employés qui doivent s'assurer de leur propre sécurité, mais la clientèle ne fait rien pour les aider, comme l'explique une employée qui souhaitait demeurer anonyme: "Si vous saviez combien les personnes âgées, les parents avec des enfants vu qu’ils n’ont pas d’école, nos vacanciers et nos Snow Birds qui reviennent, viennent en succursale faire le plein pour la quarantaine, c’est pire qu’un aéroport."
Sabrina Dumais, une employée de la SAQ, a même écrit un long message sur Facebook :
« Je suis employée de la SAQ depuis six ans et pour la première fois, bien que je sois une employée plutôt docile et que je me conforme aux directives de l’employeur, j’ai peur de rentrer au travail.
La situation en succursales est alarmante. Les files d’attente à l’extérieur du magasin sont sans fin et les mesures mises en place par notre employeur ne suffisent tout simplement pas. Elles ne nous protègent pas, pas plus qu’elles ne protègent notre clientèle. L’achalandage est parfois si important qu’il nous est impossible de respecter les demandes sanitaires de l’employeur. Le staff est réduit. Les clients se montrent agressifs quand on leur demande de privilégier les paiements par carte et les distances ne sont pas respectées.
Lors de mon dernier quart de travail, on a ri de moi lorsque j’ai demandé de maintenir une certaine distance et lorsque j’ai refusé de prendre le téléphone d'un client entre mes mains. Et plus sérieusement, j’ai dû montrer la porte à des voyageurs tout juste rentrés de voyage qui d’eux-mêmes m’ont avoué devoir être en quarantaine. Cette situation laisse présager qu’il y en a plusieurs prêts à risquer la propagation d’un virus pour un pinot noir.
Je me sens être un maillon faible de transmission et je ne suis pas la seule, tout.e.s mes collègues sont inquiet.e.s.
Je cherche à réconcilier l’incohérence des recommandations du gouvernement et le choix de laisser ouvertes les succursales de la SAQ. Idem pour la SQDC, puisqu’on m’a dit que les préoccupations y étaient les mêmes. Dans le contexte actuel où il est essentiel de respecter la distanciation sociale afin de freiner la propagation du virus pour préserver des milliers de vies, il me paraît inconcevable que les employé.e.s de l’État risquent à chaque jour leur santé et celle de leurs concitoyen.ne.s pour des produits — je suis navrée de devoir le spécifier — qui ne sont pas essentiels.
La vente d'alcool n'est pas un commerce comme les autres. Certain.e.s client.e.s en situation de dépendance n'ont pas les capacités de respecter les directives faites par l'État, même s’ils ou elles présentent des symptômes. Nous sommes donc ainsi tous et toutes plus à risque.
J’ai envie de pouvoir compter sur mon employeur.
Comment le gouvernement justifie-t-il de maintenir ouverts ses détaillants d’alcool et de cannabis ? Ne peut-il pas montrer l’exemple et faire preuve de courage lui aussi, tout comme le font actuellement tant de commerces, de restaurateurs et d’entrepreneur.e.s québécois.e.s ?
J'imagine que je vais me fatiguer et cesser d'écrire là-dessus, mais d’ici-là, si vous me voyez à la SAQ aujourd’hui, ne me touchez pas et gardez vos distances. Il en va de même de mes collègues.
J’ai envie de faire des hugs à tout le monde par soutien et amitié, mais je me retiens.
Alors faites pareil, et SVP, restez chez vous.
Et plus impérativement, protégez-nous toutes et tous, fermez la SAQ. »
Je suis employ\u00e9e de la SAQ depuis six ans et pour la premi\u00e8re fois, bien que je sois une employ\u00e9e plut\u00f4t docile et que...Posted by Sabrina Dumais on Thursday, March 19, 2020
Souhaitons aux employés que la situation s'améliore rapidement.
Source: Le Soleil · Crédit Photo: Adobe Stock