«On montre les données qu’on veut et de la façon qu’on veut»
Le gouvernement du Québec promet des décisions « basées sur la science et des données probantes » depuis le début de la pandémie. Par contre, l'accessibilité des données sur la santé est jugée inadéquate au Québec.
Si les autorités de santé publique publient des données sur le nombre de cas et le nombre de morts chaque jours, ces données manquent de précision d'après François Champagne, professeur titulaire de gestion, politique et évaluation au Département d'administration de la santé de l’Université de Montréal. Par exemple, on ignore les comorbidités des patients ou encore leur ethnicité, ce qui pourrait offrir un portrait plus détaillé de la situation.
« Depuis plus d’une semaine, le gouvernement du Québec ne publie plus la liste des CHSLD et résidences pour aînés qui ont des cas confirmés de COVID-19 », précise Radio-Canada. Une décision décriée par des experts interrogés à LCN.
De plus, le Québec est la seule province canadienne qui n'a pas publié sa stratégie de déconfinement. Et François Legault ne voulait pas rendre publics les scénarios de la propagation du virus au départ.
Et que dire du fait que les personnes qui enquêtent sur les contacts des personnes infectées travaillent « au papier et au crayon ».
« On fonctionne à l’âge de pierre », a décrié Nimâ Machouf, épidémiologiste et chargée de cours à l'École de santé publique de l'Université de Montréal.
« On est au niveau d’une république de bananes. [...] Les dépanneurs du coin ont des systèmes plus sophistiqués », a critiqué François Champagne.
Toutefois, lorsqu'un dossier est hautement médiatisé, le gouvernement du Québec arrive à présenter des données très précises.
Mais selon François Champagnes, lorsque ces données sont présentées au public, elles sont souvent « prémâchouillées ».
« On montre les données qu’on veut et de la façon qu’on veut », s'est désolé François Champagne qui dénonce un « contrôle épouvantable » des données.
Les données présentées au public sont souvent sous forme de tableaux en format PDF ou d'image floue si bien qu'il faut recopier les données à la main pour pouvoir les analyse. Pourtant, de nombreux pays dont les États-Unis fournissent des données brutes disponibles sur les sites gouvernementaux.
François Champagne croit que le gouvernement restreint délibérément l’accès aux données au public, aux chercheurs et aux médias.
« Si des données risquent d’être embarrassantes pour un ministre, le gouvernement fera tout pour ne pas les dévoiler », a déclaré pour sa part Michael Wolfson, membre du Centre de droit, de politique et d'éthique de la santé de l'Université d'Ottawa et ex-statisticien en chef adjoint à Statistique Canada.
Source: Radio-Canada · Crédit Photo: Facebook